Pleure, si tu es un homme ...


...

Comme il est fort...
Il arrive à tout prendre sur lui. Tout.
C'est ce qu'on demande à un homme. 
Etre fort. 
Capable de comprimer toute son humanité. 
Ne laisser transparaître que sa force. 
Imperméable. La puissance de la faiblesse.
L'homme, il se barde de son armada naturelle. Une couche de puissance innée. Puis par dessus, une large tranche de faire valoir. Il va sans dire qu'il s'oindra également de la violence, qui le caractérise. Quelques touches de mesquinerie. Rajoutés à ces non-dits qu'il affectionne. 

On pourrait penser qu'il est primaire.
A première vue.
C'est une erreur.
Il donne le change.
C'est ce qu'on attend de lui.
Qu'il soit si simple. Si entier. D'un seul bloc.
C'est exactement ça.
L'homme, le monobloc par excellence.

Tromperie !
Fantasme !
Affabulation !

Il n'est primaire que dans son expression.
C'est déjà beaucoup.
Un homme ne cherche pas à faire croire. Il dit.
C'est plus loin que l'on ne pouvait l'espérer déjà.
S'il annonce qu'il va chercher le pain, c'est qu'il y va. Vraiment. Et ça ne lui viendrait pas à l'esprit de fomenter un complot, au moment de descendre à la boulangerie. Dans la plupart des cas.
S'il ramène un bouquet de fleurs, en plus, c'est qu'il est passé devant le fleuriste. Et pas qu'il a un truc à se faire pardonner.
Le calcul est bien loin de lui, à cet instant.

En dehors de sa locution habituelle, cependant, il est capable de tout. Du meilleur et du pire.
Primaire ne veut pas dire stupide...
Juste uni directionnel dans ses intentions de base.

Alors, lorsqu'il regarde ses mains ouvertes devant lui, et qu'il y trouve un peu d'eau salée, ce n'est rien d'autre qu'un homme qui s'étonne de voir briller une larme sur sa paume.
Et c'est touchant, un homme qui pleure.

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