Je suis romantique. Et alors ?


...
On va rester un peu dans le thème, dès fois que ça génère des vrais je t'aime, ce serait tellement ballot de passer à côté, c'est pas tous les jours Bysance.

Le romantique, ça s'improvise pas.
Faut savoir où on met les pieds...

Je me suis donc interrogée, pour commencer, c'est quoi, être romantique, comment on le sait qu'on l'est, ou qu'on l'est pas, quelles attitudes font de vous un être romantique, qu'est-ce qui fait que vous ne le serez sans doute jamais, ou juste un peu, genre de façon ponctuelle.
Par exemple, si vous restez subjugué par un lever du jour particulièrement lumineux, il se peut qu'il y ait en vous cette petite graine qui ne demande qu'à germer, voyez-vous. Et si, en plus, c'est l'une des choses que vous allez raconter de bon matin, à la boulangère, aux passants qui passent, à votre collègue de bureau, cette petite graine est clairement déjà sortie de terre pour aspirer toute la beauté du monde, celle que vous tenez certainement entre vos mains, sans le savoir, peut être. 
Il y a une nette différence entre vous et cette autre personne qui affiche avec insolence, sur les réseaux sociaux, au hasard, n'est-ce pas, son épilation intégrale, dans une information crue et nue qui ne laissera personne insensible, et là où vous perdez votre avantage d'être romantique, c'est que votre aurore délicate ne l'emportera pas en compétition avec sa touffe qui n'étouffera plus personne...

Vous me suivez toujours ?

Le problème principal, pour le romantisme, c'est qu'il se heurte aujourd'hui en permanence contre un mur terrible, celui de la surenchère. La délicatesse d'un regard appuyé, sur la nuque d'une femme, n'a aucune chance face à une proposition directe. 
Le gain de temps est considérable, et la plupart d'entre nous n'attend pas qu'on se déclare, à mots couverts. On pense juste à sortir, couvert, en fait. 
C'est d'une tristesse sans nom, je vous l'accorde. Mais il nous faut bien vivre avec notre temps. De quoi aurait on l'air, je vous le demande un peu, si à une proposition des plus tendancieuses, on répond par des minauderies d'un autre âge, oscillant entre niaiseries et recul de vierge effarouché, sérieusement ? 
Après, ça peut plaire, si vous affichez moins de vingt ans au compter, mais là, sachez sans le moindre doute que cette génération se divise en deux catégories : les fous du cul et les intégristes religieux. Y'a plus d'entre deux, entre nous. C'est la revanche de toutes ces années de libération sans le moindre garde fou qui tienne la route, et c'est pas si mal. Une fois place nette, il suffit de reconstruire, sur les ruines, rien n'aurait jamais tenu, de toute façon, autant reprendre les fondations, et tout le bazar. Donc, la romance, elle risque de partir aux oubliettes.

Il me paraît essentiel qu'on y revienne et surtout, qu'on s'affiche.
Je suis dotée de romantisme. 
Je suis un être à tendance romanesque.
J'aime que les choses soient un peu floues, un peu tendres, un peu légères, un peu lourdes aussi. 
J'aime les atmosphères chargées de sens, lorsqu'on entre dans un lieu, pour la première fois, ce qui nous entoure, les meubles anciens, la texture, le grain du bois prisonnier sous la cire sombre et lisse, les murs tapissés, camouflés pour mieux garder les secrets, ou sans fioritures, les aspérités du ciment à vif, tout à découvert comme une prise de conscience brutale, les murs, le toit, le sol, le plancher qui craque, le carrelage ancien aux joints effrités, ou les lattes souples sur lesquelles on danse par inadvertance, presque.
J'aime croiser des odeurs, sentir et ressentir, me laisser prendre un peu par cette inspiration qui enivre, si on respire trop longtemps contre elle, que cette odeur soit accrochée à une peau connue, c'est rassurant, inconnue, c'est une donnée nouvelle, qui circule dans ta tête, ça pétille dans tes yeux parce que les odeurs, elles peuvent faire exploser ton désir de savoir si oui, si non, si jamais.
J'aime mordre dans un gâteau qui sort du four, à m'en brûler presque la langue, cette saveur chaude lorsque le sucre s'évapore contre les dents, le palais. Et je me rends compte, à force d'écrire cette sensation là, que le romantisme est infiniment sensuel. Je ne l'avais jamais vraiment perçu.

Le romantisme nous ouvre des possibilités infiniment plus heureuses que tout ce que pourriez envisager dans toute une semaine de labeur, de drague pour rien, ou pour tout prendre comme un voleur de caravane, les chiens aboient, tant pis, vous êtes déjà sur le chemin du retour, avec l'impression que vos sens sont apaisés, mais quelle erreur. Qu'avez-vous nourri, à part votre Ego, entre nous, n'est-ce pas ?

Alors qu'il vous suffirait de vous laisser entraîner dans cette valse lente, celle du savoir vivre, savoir faire, savoir y faire, se laisser faire, entrer en affaire, de cœur, de beau, d'ailleurs.
On pourrait dire qu'il s'agit d'une nouvelle petite musique intérieure, qu'elle vous changerait un peu la vie, vous déroutant d'un chemin bien trop droit pour être amusant, il y aurait des bosquets pour s'embrasser à bouche que veux-tu ici et là, des petites falaises juste pour pouvoir y grimper au sommet, et découvrir les pragmatiques, tous en bas, très affairés, bosser, manger, baiser, survivre, s'acheter une maison, construire une piscine, partir en vacances, les choses de la vie quoi.

Et il y aurait les autres.
Avec moi.
Avec toi.
Ceux d'en haut.
Ceux qui n'aspirent pas à tout ce matériel.
Ceux que rien ne peut attendre, sauf le désamour.
Et encore, suis même pas sûre.
Lorsque tu prends de la hauteur, vraiment, que tes sens sont en émerveillement continuel, parce que tu as ouvert tes yeux, tes oreilles, ton âme, n'a-t-on pas obtenu le meilleur de ce que nous offre la vie, finalement ?
Le romantisme, c'est laisser la chance aux sentiments.
Oserez-vous ?






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