Je voulais te dire MERCI

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Il y a toujours des histoires, de celles qui finissent un jour, pas forcément bien ni mal, juste qu'elles ne sont pas destinées à durer plus qu'un été. Au final, peu importe la saison, et le temps qu'elles tiendront, puisqu'elles se termineront, tôt ou tard.

Souvent, on va se dire qu'on a perdu notre temps, qu'on aurait dû couper court, plus vite, plus violent, sans appel, sans attente.

Je félicite celles et ceux qui vivent leurs histoires sans aucune attente d'aucune sorte. C'est de l'ordre de l'essence divine d'abnégation ! Je ne sais pas si c'est une chance. Arrive-t-on à tirer des leçons de vie, sans cet investissement émotionnel qui nous met un peu en première ligne, faut bien le reconnaître ? Ou bien se place-t-on en observateur privilégié, mais comment être à la fois acteur et spectateur d'une même histoire ? Même si, parfois, on peut se voir, en effet, agir avec ce léger décalage qui nous ferait presque croire qu'on est encore en train de réfléchir à l'action en cours..

De cette dernière histoire, pas la dernière de ma vie, je l'espère sincèrement, je suis passée du vécu à l'observance. Et j'ai fini par comprendre. Il s'agit de cette attente, irrépressible, qui fera de cette histoire, ce qu'elle deviendra. Il serait d'ailleurs plus juste de doubler cette attente, la nôtre confrontée à celle de l'autre. 

Il nous faut nous souvenir que nous apportons, dans nos bagages émotionnels, nos vécus, nos victoires mais aussi nos déceptions. Il me paraît possible que le tout soit lié aussi à quelque chose de plus ancien, de plus archaïque, de plus ancestral. Qui sait si le poids de nos erreurs ne sont pas teintés parfois par la mémoire de nos gênes, ce qui a déjà été par le passé, une espèce de réminiscence qui ferait ployer la balance de ce grain de sable fantomatique ? Ainsi, nos réussites seraient le fruit d'un sang multiple, tout comme nos défaites. 

C'est la raison pour laquelle j'ai supposé avoir accepté beaucoup trop de compromis pour une histoire, qui, de par sa configuration initiale, était vouée à l'échec. Je n'ai à aucun moment anticipé la somme de souffrances, d'humiliations, d'acceptations inacceptables, que j'allais encaisser pour une affaire qui aurait dû ne jamais exister. Au pire, dès le premier mensonge, il m'aurait fallu fermer la porte. 

Cette porte que j'ai laissée ouverte est fortement liée, déjà, à l'attente. Une espérance toute simple, rien de fou ni impossible, celle d'endosser enfin le costume de la fille parfaite, celle qu'on préfère à l'autre, celle qu'on entoure d'amour, la princesse aux petits pois dont on prend le plus grand soin, comme on ne le fait que pour le plus beau des trésors, celle qu'on épouse, enfin.

Je n'en n'avais pas vraiment conscience. C'était juste là, ancré au fond de mon coeur, comme un souhait d'enfant  à la portée de tous. Sauf de moi. J'ai vécu près d'un quart de siècle avec un homme qui pourtant éprouvait, je le crois sincèrement, la plus profonde des affections, mais qui n'a jamais eu l'idée d'aller au bout de ce rêve-là. Le pauvre homme est décédé aujourd'hui, et je me rends compte à quel point les premières années vécues avec lui m'étaient sans doute les plus sincères, les plus pures. Je croyais, pauvre sotte, qu'on peut toujours être plus aimée, plus amoureux, plus dans le feu, ce brasier qui nous torture et nous fait faire mille sottises. L'histoire est passée, j'ai vécu du mieux ce que j'avais à vivre avec lui, et je le regrette. Il nous a manqué ces quelques années pendant lesquelles je suis partie. Il le fallait, nous étions devenus des étrangers hostiles, et la haine était presque à notre porte, alors, avant que l'irréparable ne soit entré dans nos coeurs, je suis partie, sans me retourner.

Bien sûr que je me sens triste de n'avoir pas tendu la main mais il me fallait reconstruire, et je n'avais plus le goût ni l'envie d'être secourable. Je me sens mal à l'aise avec cet aveu-là, et pourtant, il faut bien l'écrire quelque part. Que les actes passés sont ce qu'ils sont, et qu'ils nous servent à l'avenir pour être plus à l'écoute, peut- être. Lorsqu'on le peut en tout cas. Il restera dans mon coeur et mon souvenir comme mon vieux complice, jusqu'à la fin de ses jours. J'étais là. Je râlais mais j'étais là. Je n'imaginais pas une seconde que ce soient ses dernières à lui. Mais j'étais là mon ami. J'étais là pour toi.

Aujourd'hui, je regarde le plus possible vers ce que je suis censée faire, et surtout, ce que je suis capable de réaliser.

J'ai toujours cru qu'il fallait en faire des tonnes pour être appréciée. Et je me suis astreinte à cette idée-là. Je me trompais. Oui. Encore. Et alors ? C'est bien de se tromper. Ca nous laisse la possibilité d'évoluer. Et bien on peut considérer que j'ai plein de nouveaux chemins à disposition, du coup.

Quant à l'épine dans mon talon, la chute est proche. Voilà. C'est un grand jour aujourd'hui. Je t'ai bloqué. Partout. Tu n'as plus aucun moyen technique de me contacter, et je suis partagée. Il y a des départs nécessaires, voire vitaux. Tu es de ces voies sans issues. Soit je restai dans cette impasse, seule, dans la pénombre, à attendre un improbable dénouement en ma faveur, et quand j'y pense, ce n'était pas mon espérance en vérité. Soit je reculai jusqu'à ma route principale, et passai mon chemin, en laissant derrière moi ce qui a été, ce qui a été vivifiant, et tout ce qui m'a fait du mal, toi inclus. Je n'en reviens pas moi même d'avoir eu cette force là. Moi qui suis si fragile ces temps-ci. Comme quoi. On croit se connaître, mais nous sommes plein de surprises. Donc, clôture de l'affaire Houdini. J'ai juste un peu peur que tu tentes le tout pour le tout, genre un coup d'éclat, mais à tout bien y réfléchir, ce serait fort étonnant. Tu n'as rien d'héroïque. Ni de bienveillant. Et quand bien même tu tenterais une reprise, ce qui encore une fois me surprendrait au plus haut point, il se trouve que je suis en train de redevenir moi. Et cette femme-là ne te tient pas en très haute estime, autant que tu le saches... Bref, ça ressemble à s'y méprendre à une fin sans heurts ni cris ni plus rien. Comme toi en fait.

J'ai donc fini par prendre cette ruelle de campagne, en sens inverse.

C'est dingue comme les bâtisses me semblent bien plus malingres, comme rétrécies, leurs hautes fenêtres en tuyau de poêle garnies de rideaux rococo tout raides à force d'être lavés, repassés comme les qui-savent-pas s'imaginent que sont ainsi les maisons des plus-heureux-qu'Ulysse, ceux qui vivent dans la grande rue principale. Les arbres semblent plein de force et de sève montante, mais les feuilles n'offrent que de pâles verdures étiolées, manque de soleil, manque de saveurs véritables, manque de terre vraie. In terra in veritas. Ou que sais-je encore ?

J'aime beaucoup l'idée que ce soit dans les entrailles de ce monde que se trouve, possiblement, l'exaltation suffisante à réveiller chacun.

A la question de copine thêatreuse par dixième de temps sur la grande horloge de celui qui passe et ne reviendra pas, oui, je vais écrire. Je n'avais plus la foi, je l'avais égaré sur des pavés de guingois, j'ai chuté, plusieurs fois, me suis relevée, cahin-caha, toute bringuebalante, mais ma foi, toujours là. Et ma dernière cascade m'a secouée de ma torpeur pour me rappeler à quel point il était vital pour moi d'aligner tous ces mots. Souvent avec une certaine maladresse mais toujours avec conviction. Sur le moment, tout du moins, ce qui n'est déjà pas si mal. Oui, je vais écrire encore. Tant pis pour ceux qui détestent ce que j'ose afficher. Et Youpie-Joie, comme dirait l'autre, pour les addicts.

Je ne serai sans doute jamais une grande aventurière, à traverser les pampas du monde, avec un sac à dos Qichouïa, et des baskets anti-moustiques. Bon.

Mes limites se borneront aux Cinq-Terres, la Toscane en Automne, et un feu qui crépite dans une maison bien isolée. J'aime tricoter des trucs pour réchauffer les cous des personnes que j'aime. Je continuerai de bricoler des oeuvres d'art en péril, qui n'ont de sens que pour moi, et feront toujours éclater de rire mon fils, une fois la stupéfaction passée. Je suis une petite femme bizarre hypersensible qui aime les couleurs et les textures, et les choses qui flottent sans combustion dans les airs, les nuages, les bulles de savon qui n'éclatent pas, le lierre qui pousse sans moi, les gens qui m'aiment sans raison, moi qui ait tellement de mal à me trouver appréciable pour de vrai. Je vois bien que ce texte part en saucisse, et ça me ressemble tellement, de tout vouloir dire en même temps, qu'au final, je perds à peu près tout le monde, sauf peut-être mes plus proches compères, qui ont l'habitude de mes disgressions logorrhéiques.

Je peux juste rajouter que je te dis MERCI, toi qui viens de lire ces quelques lignes insignes. Tout n'est pas très clair, mais l'essentiel y est. L'espoir. L'envie de vivre. La lumière.





Commentaires

  1. Comme d’habitude un style tout à toi qui me rempli d’aise en le lisant... continue à écrire pour mon, notre plus grand plaisir ...👍

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    1. Je ne promets pas la régularité, mais enfin, j'y reviens toujours... donc ... merci à toi, ô inconnu anonyme (ce doublon m'extasie, tu penses...) pour ton soutien ... les commentaires sont rares, et je le déplore ...

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  2. Je trouve que tu produits ces derniers temps avec régularité... faut croire que l’approche de l’été t’inspire ... pas des plores tu va mouillé cette page blanche et l’encre va bavée pour rendre tes pensées incompréhensibles ... l’inconnu de 6h45...😉🤣🤣

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    1. J'essaie, j'essaie... sauf problème technique comme cette semaine dernière...

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